Africa Renouveau: Dans quelle mesure l'Afrique est-elle pr锚te 脿 r茅pondre au COVID-19 ?

Dr. Nkengasong: Nous avons eu la chance que le COVID-19 n'ait pas commenc茅 en Afrique. Nous avons eu le temps d'observer ce qui s'est pass茅 en Chine en d茅cembre 2019 et janvier 2020, et de pr茅parer rapidement les pays 脿 r茅agir dans des domaines cl茅s. L'un de ces domaines est le diagnostic. D猫s la deuxi猫me semaine de f茅vrier, seuls le S茅n茅gal et l'Afrique du Sud pouvaient diagnostiquer le COVID-19. Ainsi, au S茅n茅gal, nous avons rapidement r茅uni des repr茅sentants de laboratoires de 16 pays africains, les avons form茅s et leur avons donn茅 du mat茅riel de diagnostic. Ensuite, nous avons organis茅 une formation bas茅e sur les comp茅tences en Afrique du Sud, o霉 nous avons 茅galement fourni du mat茅riel de diagnostic. Puis nous sommes revenus au S茅n茅gal et avons form茅 un autre groupe. Jusqu'脿 pr茅sent, nous avons form茅 des repr茅sentants de laboratoires de 48 pays. Les cas d茅tect茅s aujourd'hui sont le r茅sultat de cet effort massif.

Quels sont les autres domaines ?

Le deuxi猫me domaine sur lequel nous nous sommes concentr茅s 茅tait la pr茅vention et le contr么le des infections. Nous avons reconnu que le COVID-19 pouvait submerger nos 茅tablissements de soins et que les infirmi猫res et les m茅decins pouvaient 锚tre touch茅s. Nous ne pouvons pas nous permettre que 3 000 m茅decins ou travailleurs de la sant茅 soient infect茅s, comme ce fut le cas en Chine. Nous avons donc imm茅diatement r茅uni les repr茅sentants de 35 pays au Nigeria et les avons form茅s 脿 la pr茅vention et au contr么le des infections. Au Kenya, nous avons r茅uni des repr茅sentants de plus de 30 pays pour les former au renforcement du d茅pistage dans les a茅roports, les compagnies a茅riennes et les points d'entr茅e.

Puis nous nous sommes rendus en Tunisie et avons form茅 les pays 脿 la communication des risques au grand public.

Comment l'Union africaine apporte-t-elle son soutien ?

Nous faisons appel 脿 toutes les comp茅tences - des 脡tats membres, du CDC Afrique et de l'OMS - pour r茅pondre au COVID-19.

Au niveau politique, Africa CDC et la Commission de l'Union africaine, sous la direction du pr茅sident Moussa Faki Mahamat, ont convoqu茅 une r茅union de tous les ministres de la sant茅 le 22 f茅vrier o霉 nous avons convenu de la n茅cessit茅 d'avoir une strat茅gie continentale coordonn茅e qui repose sur la coop茅ration, la collaboration, la coordination et la communication.

Le deuxi猫me r茅sultat de cette r茅union a 茅t茅 la cr茅ation de la Task Force africaine pour la pr茅paration et la r茅ponse aux coronavirus. Le volet pr茅vention et contr么le des infections de cette task force est co-dirig茅 par le Nigeria et le CDC Afrique. La partie laboratoire de ce groupe est codirig茅e par le S茅n茅gal, le CDC Afrique et l'Organisation mondiale de la sant茅 (OMS).

Quels sont les principaux d茅fis 脿 relever jusqu'脿 pr茅sent ?

L'approvisionnement pose de s茅rieux probl猫mes. 脌 New York, vous entendez le gouverneur parler de p茅nurie de respirateurs et d'autres fournitures. En Afrique, nous ne fabriquons pas ces articles, nous les importons. Mais maintenant que le monde consomme beaucoup de ce qui est produit, il devient difficile pour nous d'obtenir ces articles qui nous permettront de mieux nous pr茅parer et de mieux r茅agir.

Que comptez-vous faire 脿 ce sujet ?

Nous avons travaill茅 tr猫s dur avec le bureau du Premier ministre 茅thiopien, Abiy Ahmed, et la Fondation Jack Ma, qui ont lanc茅 conjointement une initiative pour soutenir les pays africains avec une 茅norme cargaison de mat茅riel de diagnostic. Je l'appelle la "mission marathon" car nous avons sept employ茅s [du CDC Afrique] 脿 l'a茅roport qui coordonnent avec Ethiopian Airlines, l'OMS et le gouvernement 茅thiopien la distribution dans toute l'Afrique d'environ un million de kits de test, six millions de masques et 60 000 combinaisons de protection.

Le stock actuel nous permettra de gagner du temps pendant environ deux 脿 trois semaines. Mais dans les deux semaines 脿 venir, nous devons, en tant qu'Africains, disposer de notre propre stock. Le CDC Afrique et l'UA se rendront dans le monde entier pour constituer des stocks massifs afin que nous puissions soutenir les 脡tats membres dans la lutte contre le COVID-19.

Comment le CDC Afrique collabore-t-il avec l'OMS ?

Nous collaborons tr猫s bien avec l'OMS. Je porte 茅galement une double casquette en tant qu'envoy茅 sp茅cial du Dr Tedros [Adhanom Ghebreyesus, directeur g茅n茅ral de l'OMS] pour l'Afrique dans le cadre du COVID-19.

Nous venons de terminer un appel avec le Dr Matshidiso Moeti [directeur r茅gional de l'OMS pour l'Afrique] et il y a deux jours, elle et moi avons discut茅 des strat茅gies de coordination et de sensibilisation. L'OMS a 茅galement jou茅 un r么le important dans l'envoi de mat茅riel de diagnostic aux pays.

Quelles sont les informations dont vous disposez concernant le d茅veloppement et l'accessibilit茅 des vaccins ?

Nous ne sommes pas proches d'un vaccin. Nous aurons la chance de disposer d'un vaccin d'ici un an 脿 un an et demi. Je suis membre du conseil d'administration de la Coalition for Epidemic Preparedness Innovation, qui a 茅t茅 cr茅茅e apr猫s l'茅pid茅mie d'Ebola de 2013 en Afrique de l'Ouest pour faciliter la mise au point de vaccins. Au sein de ce groupe, je fais 茅galement partie du sous-comit茅 pour l'acc猫s 茅quitable, o霉 nous d茅fendons l'acc猫s aux vaccins pour les populations vuln茅rables.

Des le莽ons 脿 tirer de l'茅pid茅mie d'Ebola ?

L'une des le莽ons que nous avons tir茅es d'Ebola est l'importance du d茅ploiement de jeunes intervenants africains. Lors de la crise Ebola en Afrique de l'Ouest, nous avons recrut茅 800 personnes dans ce que nous avons appel茅 la Force africaine de volontaires des soins de sant茅, et nous ferons de m锚me pour faire face 脿 cette pand茅mie.

脌 l'heure o霉 nous parlons, plus de 50 intervenants sont ici [脿 Addis-Abeba] et nous les avons fait venir de diff茅rents pays pour soutenir notre r茅ponse. Et nous en envoyons certains au Nigeria et d'autres au Cameroun. Nous pr茅voyons d'intensifier cette action tr猫s rapidement.

Quel est votre dernier message aux Africains ?

Mon message 脿 l'Afrique est que nous devrions adh茅rer 脿 la strat茅gie continentale approuv茅e par les ministres africains de la sant茅 en f茅vrier et d茅fendue par le pr茅sident de l'Union africaine pour 2020, le pr茅sident sud-africain Cyril Ramaphosa.

Si nous n'avons pas une strat茅gie continentale qui nous permette de coordonner, de collaborer, de coop茅rer efficacement et de communiquer, nous sommes condamn茅s. Aucun pays ne peut 茅liminer le COVID-19 脿 lui seul en Afrique. Nous devons faire preuve d'une unit茅 de but et travailler collectivement pour mener et gagner la guerre contre le COVID-19. Nous n'avons pas le choix.